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Démarrée depuis samedi 8 juillet, la lutte traditionnelle EVALA 2023 du jeune garçon, a pris  fin le 16 juillet dernier pour laisser place au rite initiatique Akpéma de la jeune fille, en pays Kabyè. Tout comme le jeune garçon rentre dans la catégorie des adultes par les rites des Evala et Kondona, la jeune fille n’est considérée dans sa communauté qu’à travers la cérémonie d’Akpema. Bien que cette dernière soit moins médiatisée, elle est très importante pour l’identité culturelle et la socialisation de la femme Kabyè. Elle a lieu généralement entre mi-juillet et fin août de chaque année. Pour l’édition de cette année, beaucoup de cantons vont donner le ton cette semaine.

Evala, un rite initiatique primordial pour le jeune garçon Kabyè

Pratiqué depuis le XVIIIe siècle, le rite initiatique Evala est le premier dans l’ordre des manifestations initiatiques du jeune kabyè. Elle consacre non seulement le passage de l’adolescence du jeune kabyè (18 à 20 ans) à l’âge adulte, mais également l’affirmation de son identité culturelle.

À l’origine, les combats duraient plusieurs heures et se pratiquaient avec une chicotte et un bâton fourchu. À l’aide de ces deux objets, les adversaires se combattaient en se frappant simultanément jusqu’à ce que l’un fasse tomber ou renverser l’autre, épuisé par les coups reçus. Lorsque celui-ci tombe, le présumé vainqueur se précipite sur lui et s’assied sur sa poitrine. Et c’est à cet instant précis que l’arbitre déclare la fin de la partie.

Mais vers 1940, ce rite est devenu moderne et s’est transformé en lutte avec les compétitions organisées entre différents villages d’un même canton. Au-delà de l’initiation, l’organisation actuelle a incorporé aux rituels un côté festif qui crée un spectacle magnifique à chaque célébration.

La finalité première du rite Evala est d’habituer le jeune Kabyè à l’endurance, au courage, à l’abnégation et au stoïcisme dont l’aspect culturel est rehaussé par les sacrifices que l’initié doit consentir : le jeûne, l’abstinence sexuelle et les scarifications qui sont les signes extérieurs de défenseur de la cité.

Ainsi, le rite initiatique est constitué d’attrapades, d’internements et d’autres cérémonies bien plus éprouvantes. La viande du chien constitue un élément central et primordial dans le rituel Evala. Pour l’aspirant Evalou, cette consommation ne se fait pas par simple plaisir ou de façon volontaire. C’est plutôt une prescription nécessaire à l’accomplissement des rites initiatiques. L’initié, qu’il le veuille ou non, est tenu de consommer la chair de chien pour acquérir les qualités reconnues à cet animal : l’endurance, la ténacité, la force et l’intelligence.

En effet, la coutume recommande, dans la mesure du possible, que l’animal soit acheté par l’oncle maternel du garçon devant subir l’initiation. Et lors du rituel chez l’oncle maternel, celui-ci, devant tout le clan réuni, édicte les règles morales que le jeune initié doit désormais suivre, sous peine de malédiction. « Tu ne voleras pas, tu n’insulteras personne, tu ne mépriseras pas tes cadets, tu respecteras absolument ta mère, ton père et toute personne âgée, tu respecteras le bien d’autrui, tu respecteras la terre et la nature qui n’appartiennent qu’à Dieu. » Kéyéwa (1997, p. 173)

Les Evala sont donc un examen de socialisation de l’adolescent qui est tenu de lutter pendant trois années consécutives. Après les rites, celui-ci prend un nouveau statut social avec des droits, mais aussi des obligations. Cette entrée dans le cercle des initiés lui attribue le nom d’Evalou  (l’aspirant) dont le pluriel donne Evala. Il acquiert ainsi des prérogatives très importantes, dont entre autres : le droit d’exploiter la terre à son propre compte, de consulter les devins, de se marier, de défendre la cité en cas d’agression.

À l’inverse, le jeune qui se dérobe à cette initiation n’est pas considéré et accepté dans certains cercles qu’il n’ose lui-même approcher. En tant que tel, il subit les représailles de la communauté et de ses propres parents. Même si le modernisme ambiant et le foisonnement des religions importées n’en font plus tellement un problème.

Après l’étape initiatique, les luttes mettent aux prises deux équipes évoluant en série de quatre ou cinq pour des combats spectaculaires dans une arène préparée à cet effet. Les lutteurs s’affrontent et s’empoignent, torses nus, sous le regard crispé des parents, amis et curieux venus les encourager aux sons des cors, des gongs, des castagnettes et des tam-tams. Les dates auxquelles se tiennent les cérémonies sont fixées par la consultation des oracles suivie de l’autorisation accordée par le grand prêtre appelé Tchodjo. Plusieurs phases d’affrontement entre les camps en lice permettent finalement de proclamer les vainqueurs selon le nombre de victoires remportées sur l’ensemble de la partie. La présence des sages de la communauté qui veillent au respect du règlement, assurant la direction de l’arbitrage des luttes, révèle l’aspect traditionnel de la cérémonie. Tout comme au début, à la fin des Evala, les prêtres traditionnels font une tournée dans les lieux sacrés, essentiellement les sanctuaires que l’on retrouve dans les forêts et grottes, pour remercier les ancêtres d’avoir permis un bon déroulement des rites initiatiques.

Ce sont des cérémonies initiatiques quinquennales en pays Kabyè. Au lendemain de la clôture des Evala, le jeune garçon, Evalou (jeune initié), qui a terminé ses trois ans de lutte, devient Ezoukpo (classe d’âge intermédiaire) et peut aspirer maintenant à devenir Kondo (adulte). Il va donc se voir raser la tête, subira le rituel au cours duquel un collier sera mis autour de son cou, puis un gong lui sera remis.

Devenu ainsi Kondo, le jeune homme, avec ces signes distinctifs, peut librement circuler dans le milieu. Le jour de l’apothéose, il se distingue par la danse, l’escalade de la butte et surtout la frappe du gong. Cette cérémonie initiatique est un véritable test pour permettre aux jeunes leur intégration dans la classe des adultes (Kondona), en leur conférant qualité et dignité. Elle leur donne, s’ils y réussissent, le pouvoir de prendre part aux décisions concernant la vie de la communauté. Tous les rituels évoqués ici ont un sens culturel très significatif.

A suivre…

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